Anca Visdei
est fascinée, elle aussi, par Don Juan, Don Giovanni, si vous
préférez, qu'il soit mythe, homme ou femme. Dans ce cas
son nom sera Doña Juana, comme le titre de sa dernière
pièce. Cette fascination de la séduction éclatait
déjà dans sa première comédie, Atroce Fin
d'un Séducteur, lauréate du concours de l'Acte (Metz 1985).
Elle explosait dans son roman, l'Eternelle amoureuse ou Confession d'une
séductrice, qui pétilla au box office des librairies pendant
l'été dernier. Vous remarquez ? Côté cour
(théâtre) c'est la fin d'un séducteur qui prend
l'identité de " Doña Juana " ; côté
jardin (roman), la confession d'une séductrice. Don Juan, Doña
Juana, qu'importe le sexe, c'est toujours la personnification de la
séduction. Don Juan ! Le " Burlador ", le
trompeur, comme on dit en espagnol, car la séduction est, fatalement,
trompeuse
Au reste, Anca Visdei sait de quoi elle parle. Les rapports
avec son héros, mâle ou femelle, sont dipiens et
le héros prend, tour à tour, l'apparence de l'amant (ou
du mari), du frère (ou de la sur), du père (ou du
confesseur) qu'il faut séduire encore, toujours séduire
ou bien tuer
ou bien encore, ce qui est plus raffiné,
inciter à se tuer lui-même
Juana est la séductrice
dans toute sa splendeur. L'auteur précise qu'elle a les cheveux
noirs et les yeux violets. Couleur qu'elle croit retrouver dans les
yeux de ceux qu'elle s'acharne à conquérir. Couleur qu'ils
perdent dès qu'ils ont cessé de plaire. C'est-à-dire
dès qu'elle les a " possédés ".
Car c'est bien de possession qu'il s'agit, le but de la séduction
étant la possession brutale, totale, définitive. Après
? Dehors, au suivant ! Tirez-en la moralité car, ici, il ne s'agit
plus de morale. En attendant, laissez-vous séduire
André Camp